À l’époque de son ouverture, le Grand Cinéma Saint-Paul proposait chaque jour une séance en matinée, à 14 heures, et une en soirée, à 20 heures. Au cours de chaque séance, d’une durée de trois heures, était projetée une suite de films, dont un en tête d’affiche, et des actualités filmées, le tout entrecoupé d’attractions, d’intermèdes musicaux et « de deux entractes »[1].
Dans son essai autobiographique, Unhomme comme un autre, Georges Simenon écrit : « Un jour par semaine, nous nous rendions au cinéma, non en ville, […] mais au cinéma Saint-Paul, dans notre quartier, où nous reconnaissions des visages aperçus dans la journée. Et à l’entracte, entre les deux films, on allait boire une verre dans un bar voisin en attendant la sonnerie annonçant la fin de l’entracte »[1]. On était alors à la fin des années 1920 ou au début des années 1930. Claude Dubois, autre enfant du quartier né en 1944, raconte dans son livre de souvenirs : « Mes grands-parents, mes oncles, mes grands-tantes fréquentaient le Saint-Paul, tout le monde s’y était croisé un jour ou l’autre »[2]. Ce cinéma, qui dans sa construction d’origine avait la particularité de disposer de deux entrées – l’une située au 38 rue Saint-Paul et l’autre 73 rue Saint-Antoine – anima pendant près de cinquante ans la vie de tout le quartier, cela jusqu’à sa disparition en 1967. Il fut alors remplacé côté rue Neuve Saint-Pierre par un nouvel immeuble sans grâce abritant aujourd’hui un magasin Monoprix et des logements. C’est l’histoire largement oubliée du Grand Cinéma Saint-Paul, qui fut l’un des plus grands cinémas de Paris au moment de sa construction, que l’on va raconter ici.